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Pourquoi Séoul mise sur la construction navale dans ses négociations avec Washington

Posté le par AFP

Déjà frappée par des droits de douane sur ses industries-clés de l’acier et de l’automobile, la Corée du Sud peut faire valoir une autre carte maîtresse dans ses négociations commerciales avec Washington: la construction navale.

Avec la menace d’un droit de douane national de 25% encore suspendu jusqu’au 8 juillet, la quatrième économie d’Asie et son président tout récemment arrivé à la barre disposent d’une fenêtre pour arracher un accord avec les Etats-Unis. Et les chantiers navals sud-coréens pourraient bien peser dans la balance.

L’AFP fait le point sur la situation:

– Pourquoi ce secteur? –

Le président Park Chung-hee, élu pour la première fois en 1962 et reconduit jusqu’en 1979, a encouragé le pays à développer son industrie lourde, en désignant des secteurs tels que l’acier et la construction navale comme « stratégiquement importants ».

Dans le même temps, en 1968, est créée la Compagnie Sidérurgique de Pohang (POSCO), le quatrième producteur mondial d’acier aujourd’hui. Le conglomérat Hyundai fait construire quelques années plus tard son chantier naval à Ulsan, dans le sud-est du pays.

La concurrence européenne a alors du mal à suivre le rythme: le chantier naval suédois Kockums dépose le bilan en 1987.

Dans les années 1990 et 2000, les géants sud-coréens des chantiers navals, Hyundai Heavy Industries (HD Hyundai) et Samsung Heavy Industries en tête, intensifient leurs investissements dans la recherche et le développement, soutenus par de généreuses subventions publiques.

Le pays acquiert un avantage concurrentiel dans le domaine de l’assemblage de navires à forte valeur ajoutée, notamment les méthaniers et les pétroliers.

Aujourd’hui, la Corée du Sud est le deuxième plus gros constructeur de navires au monde, juste derrière la Chine.

– Que représente-t-il? –

Avant les menaces de droits de douane agitées par Donald Trump, les exportations sud-coréennes avaient atteint un niveau record en 2024.

Selon les analystes, la construction navale était l’un des principaux moteurs: le secteur représente près de 4% du total des exportations sud-coréennes et avait augmenté en 2024 de près de 20% par rapport à l’année précédente.

Les données de l’industrie montrent que depuis début 2025, les nouvelles commandes ont déjà dépassé les 13.000 milliards de wons (8 milliards d’euros).

En mars, Hanwha Ocean, autre mastodonte du secteur, a décroché un contrat d’une valeur de 1,4 milliard d’euros pour la construction de méthaniers pour l’entreprise taïwanaise Evergreen Marine.

Au total, quelque 120.000 Sud-Coréens travaillent dans la construction navale – environ 1% de la main-d’oeuvre du pays – et ce sans compter les emplois indirects liés au secteur.

– Quelle importance pour Séoul? –

Donald Trump a montré « un intérêt significatif pour la coopération entre la Corée du Sud et les Etats-Unis dans le domaine de la construction navale », avait déclaré en avril le ministre sud-coréen du Commerce, de l’Industrie et de l’Energie, Ahn Duk-geun.

Les chantiers navals américains, comme européens, sont à la traîne par rapport à la Corée du Sud et à la Chine, ce qui fait de ce secteur une « monnaie d’échange très importante dans les négociations commerciales », selon Ahn Duk-geun.

En marge d’une réunion en mai des ministres des Finances de la Coopération économique Asie-Pacifique (Apec) en Corée du Sud, le représentant américain au Commerce, Jamieson Greer, a rencontré Chung Ki-sun, le vice-président de HD Hyundai.

« Les industries sud-coréennes de la construction navale et de la défense voient une fenêtre d’opportunité », souligne Kim Dae-jong, professeur à l’université Sejong.

– Et pour Washington? –

Jamieson Greer a par ailleurs rencontré le PDG de Hanwha Ocean, la première entreprise non américaine autorisée à effectuer une maintenance en cale sèche d’un navire de la marine américaine, signe que Washington considère la Corée du Sud comme un pays stratégique en termes de défense.

Face aux inquiétudes croissantes suscitées par l’expansion de la flotte chinoise et le risque de conflit dans le détroit de Taïwan, les Etats-Unis ont commencé à rechercher des chantiers navals étrangers fiables pour soutenir leurs opérations dans la région Asie-Pacifique.

Le marché mondial de l’entretien, de la réparation et de la révision des navires devrait dépasser les 60 milliards de dollars par an, selon les estimations de l’industrie.

– Quels défis? –

Malgré des contrats à plusieurs milliards de dollars, les données suggèrent que l’industrie de la construction navale en Corée du Sud perd du terrain dans la course mondiale, dominée par la Chine.

Le pays doit investir davantage, estime Rhee Shin-hyung, professeur à l’Université nationale de Séoul.

Séoul doit par ailleurs réviser les réglementations « pour soutenir le développement des navires écologiques de prochaine génération », dont la demande augmente, poursuit-il.

Le déclin démographique de la Corée du Sud pose un risque pour le développement de ce secteur.

Les commandes sont en baisse en 2025, ce qui laisse entendre que « le boom de la construction navale pourrait prendre fin plus tôt que ce que le marché ne l’avait prévu », alerte Rhee Shin-hyung.

hs/ceb/vgu/rr

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