Les batteries sont omniprésentes dans notre vie quotidienne : dans les appareils électriques d’usage quotidien, dans le transport de manière générale, les voitures, qu’elles soient thermiques ou électriques, les camions, les trains, etc. Le choix des matériaux des composants des batteries est fondamental pour assurer des prix acceptables et les performances requises.
La pertinence de ce choix est analysée ici puisque, dans le cadre de la transition énergétique, les batteries sont devenues un des outils principaux de l’électrification accélérée du système économique européen ainsi que du stockage de l’énergie nécessaire à la compensation de l’intermittence des productions électriques éoliennes et photovoltaïques.
Les composants précités sont les électrodes et l’électrolyte. Une batterie est en effet composée de plusieurs cellules connectées les unes aux autres, chacune d’entre elles étant constituée de quatre éléments : une électrode positive, une électrode négative, un électrolyte et un séparateur entre les deux électrodes qui ne permet le passage que des ions. Les électrodes sont raccordées à un circuit électrique extérieur via un collecteur de courant (une plaque conductrice).
Les batteries de loin les plus utilisées actuellement sont celles à lithium-ion (Li-ion). Elles sont présentes dans des applications variées telles que les téléphones portables, les PC portables, les voitures électriques et le stockage d’énergie.
Quand la cellule se charge, les ion Li+ migrent vers l’anode et sont intégrés dans sa structure, tandis que les électrons s’accumulent sur la cathode. Quand elle se décharge, c’est-à-dire quand les électrons passent dans le circuit électrique extérieur auquel la cellule est connectée (le courant électrique), les ions Li+ font le mouvement inverse et retournent vers la cathode.
Les appareils électroniques portables tels que les téléphones ou les pc utilisent principalement des batteries lithium polymère avec une cathode composée de dioxyde de lithium et de cobalt (LiCoO2) et une anode en carbone (entre autres, le graphite), l’électrolyte étant un sel, l’hexafluorophosphate de lithium (LiPF6), dissous dans un mélange de carbonate d’éthylène de propylène ou de diméthyle. Les batteries NMC (cathode nickel, manganèse, cobalt) sont une référence dans les batteries lithium-ion pour voitures électriques nécessitant une forte densité d’énergie et un haut rendement.
D’autres types de batteries, dont celles avec une cathode contenant du phosphate de fer et de lithium, offrent même des durées de vie plus longues et des taux de décharge plus élevés.
Même si la batterie Li-ion est très largement utilisée, elle présente néanmoins de sérieux problèmes. Elle est notamment onéreuse et présente un risque d’embrasement soudain avec dégagement de gaz toxique.
L’échauffement vient le plus souvent de températures trop élevées, de chocs (collisions ou accidents) ou d’un court-circuit. Une batterie qui prend feu libère également de l’oxygène, ce qui alimente l’incendie. Lors d’une collision, pour éteindre l’incendie d’une VE, l’eau, la mousse, la poudre sèche et le CO2 ne peuvent pas être utilisés, car ils ne font qu’aggraver le problème. L’explosion des batteries au lithium-ion dégage une fumée toxique.
Quant aux matériaux de la cathode tels que le cobalt, ils sont relativement rares. Ainsi le cobalt n’est qu’un sous-produit des mines de cuivre et de sel. Néanmoins, il est possible d’en réduire la consommation en recouvrant la cathode de la pile par du graphène (couche de carbone d’un atome d’épaisseur, très solide et bon conducteur d’électricité), ce qui permet d’en prolonger la durée de vie. Si le cobalt est utilisé, c’est qu’il offre l’avantage d’offrir une conductivité élevée, favorisant l’évacuation de la chaleur et diminuant ainsi, sans les annuler, les risques précités d’embrasement.
Un autre inconvénient important des batteries Li-ion est qu’elles sont tributaires de l’approvisionnement en lithium, dont les gisements sont mal répartis géographiquement. Ce dernier est majoritairement extrait dans seulement trois pays : l’Australie (près de la moitié de la production mondiale), le Chili et la Chine. Et pour compliquer les choses, les deux tiers du lithium produit dans le monde sont ensuite transformés en Chine, un risque majeur pour l’UE.
La production de batteries en Europe est non seulement faible, mais elle était et est encore concentrée dans quelques pays (Allemagne, Hongrie, Pologne et Suède) et est toujours largement contrôlée par des entreprises étrangères (américaines, chinoises et sud-coréennes).
La disponibilité des matières premières, dont les métaux rares, étant essentielle dans le cadre de la volonté de la Commission européenne d’accélérer le déploiement des voitures électriques, il s’avère indispensable d’en réduire les importations. Dans ce contexte, le recyclage des batteries Li-ion ne peut être négligé. Même s’il ne sera pas suffisant pour se passer des importations, il contribuera du moins à les diminuer.
Afin de soutenir ce principe d’économie circulaire, la réglementation européenne a prévu que les batteries produites doivent contenir un pourcentage de matériaux provenant de batteries recyclées. En outre, l’Europe souhaite produire ses propres batteries dans des Gigafactories.
Bref, si les batteries Li-ion se sont améliorées ces dernières années, elles ne sont pas exemptes de problèmes notamment en matière de sécurité (risque d’incendie), de durabilité des matériaux, de poids, de temps de charge, d’autonomie et de capacité de stockage et – at last but not least – de fourniture de lithium, matériau rare dont la production est dominée par la Chine.
Pour préserver sa souveraineté, l’UE serait bien inspirée de s’intéresser davantage aux batteries n’utilisant pas ou peu de matériaux rares et en particulier, celles qui sont plus performantes que les accumulateurs Li-ion. De telles alternatives existent. Citons-en deux très prometteuses.
La batterie Li-soufre
Son électrode négative contient du lithium et son électrode positive du soufre, lequel est un matériau bon marché et abondant.
Son principal intérêt est sa densité énergétique très élevée, de l’ordre de deux à trois fois supérieur à celle de l’accumulateur Li-ion. Par rapport à ce dernier, elle est plus légère et moins polluante, moins dangereuse, moins coûteuse et performe mieux à basse température. Elle permet une charge ultrarapide.
Sa substitution à la batterie Li-ion permettrait, par exemple, à un smartphone de fonctionner beaucoup plus longtemps ou à une voiture électrique de parcourir nettement plus de km avant de devoir être rechargés.
Toutefois, elle perd rapidement en capacité lorsqu’on la recharge souvent. Les prototypes actuels ne peuvent accomplir autant de cycles de charge que les batteries Li-ion conventionnelles. Des chercheurs ont observé que l’adjonction de poudre de quartz permet d’enrayer la perte de capacité qui intervient dans le temps. En outre, avec cette addition de poudre de quartz dans l’électrolyte, la performance de la batterie Li-soufre augmente de 25 à 30 % selon Claire Villevieille, chercheuse à l’Institut de recherche suisse PSI (Paul Scherrer Institut).
L’université de Monash en Australie compte commercialiser plus rapidement que Stellantis et Zeta Energy sa batterie Li-soufre. La légèreté, la haute densité énergétique et la grande autonomie de cette dernière permettent aux chercheurs de l’université susmentionnée de viser le marché des drones.
Ses principaux inconvénients sont qu’elle est sujette à la corrosion et qu’elle dure moins longtemps que sa concurrente à Li-ion.
La batterie zinc-ion
Elle présente de nombreux avantages que ne possède pas, ou pas assez, la batterie Li-ion : une sécurité accrue, un coût réduit, une grande abondance, un risque d’incendie et d’explosion considérablement plus faible, l’électrolyte étant aqueux, un grand nombre de charges et de décharges sans dégradation significative.
En ce qui concerne cette dernière propriété, des chercheurs des universités Hopkins et Cornell ont découvert qu’un polymère spécial appliqué sur les électrodes de batteries à zinc-ion permet d’allonger leur durée de vie, cette technique atténuant les dommages causés par la charge rapide.
En effet, lorsque la batterie subit une charge rapide, les ions de zinc se déplacent entre l’anode et la cathode à une vitesse élevée, conduisant à la formation de filaments métalliques (dendrites) de zinc qui peuvent traverser la séparation entre les électrodes, provoquant un court-circuit et rendant la batterie inutilisable. L’ajout d’une petite concentration de polyéthylène glycol (PEG) dans l’électrolyte crée une couche mince sur la surface des électrodes qui empêche la formation des brins métalliques.
Les batteries zinc-ion offrent un grand potentiel pour le stockage stationnaire en termes de capacité élevée, de faible coût et d’absence de toxicité.
L’industrie européenne des batteries Li-ion ne représente qu’environ 14 % de la production mondiale et dépend largement d’entreprises asiatiques. Les importations de ces dernières en Europe proviennent principalement de la Chine et de la Corée du Sud qui dominent l’ensemble de la chaîne, de l’extraction des matières premières à la fabrication des batteries.
Même si l’UE exploitait ses propres réserves de Li (largement insuffisantes), il lui faudrait encore importer 13 des 34 matières critiques selon la Commission européenne.
En outre les prix européens ne peuvent être compétitifs face à la Chine et aux États-Unis puisque ces derniers disposent d’une énergie nettement meilleur marché.
Dès lors, l’UE et ses États membres devraient investir également dans le développement de batteries alternatives telles que celles précitées, n’utilisant pas ou peu de matériaux rares et offrant des performances nettement supérieures à celles des batteries Li-ion.
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